
lundi 21 septembre 2009
dimanche 20 septembre 2009
vendredi 11 septembre 2009
mardi 7 juillet 2009
vendredi 3 juillet 2009
jeudi 2 juillet 2009
lundi 22 juin 2009
vendredi 19 juin 2009
jeudi 18 juin 2009
mardi 16 juin 2009
jeudi 11 juin 2009
mardi 9 juin 2009
lundi 8 juin 2009
mardi 28 avril 2009
Tokyo Sonata by KIYOSHI KUROSAWA
Il est des films discrets, intimistes, mais qui attirent immédiatement le regard et attisent notre curiosité.
Tokyo Sonata est de ceux-là, mettant en abime un couple en déroute habitant dans une rue générique de Tokyo, une famille en voie de décomposition qui peine à refonder ces valeurs qu’elle croyait immuables.
Ozu célébrait les rituels patriarcaux, la figure tutélaire du père.
Avec Tokyo Sonata, Kiyoshi Kurosawa lui en sonne le glas avec distinction, humour et perspicacité.
Au-delà de cette relecture de la trame d’un Home Drama à la Ozu, s’échafaude une formidable réflexion sur l’évolution de la société japonaise, sur ses mutations, ainsi qu’un film aux indéniables qualités plastiques : beauté des panoramiques filés en travelling.
Ombres et lumières, poésie de la mise en scène et du jeu atypique des acteurs.
Parmi tant de scènes à citer : demeure celle où le plus jeune des fils pianote imperturbablement sur un clavier trouvé dans la rue qui jamais ne rendra de son, mais renforcera autant son plaisir que le sentiment de sa vocation.
Scène toute simple, pas édifiante pour un sou mais où sourd l’émotion.
Parallèlement, tout a valeur de parabole dans ce film, les postures, les déclarations de principe, la place du père et des fils et même la maison ; mais les apparences ont tôt fait d’être démontées.
Au fil du récit, les personnages : un père au chômage, son gamin qui tend à la maturité, son autre fils, jeune homme qui prend le parti-pris des États-Unis- ancien ennemi- doivent se perdre pour mieux se retrouver au sein de la communauté familiale ; la femme fait office de rempart contre la dislocation des valeurs ancestrales.
C’est d’ailleurs, sa présence : elle est là devant nous tapie dans l'ombre de sa cuisine, fantôme aux bras ballant tenus le long du corps.
Son apparition clôt le film . Présence renforcée par un travail subtil, aigu de la photographie qui la capte entre chien et loup devant une mer aux vaguelettes dont les mouvements semblent avoir été accélérés.
Un grand, rare et beau film qui surprend et étonne.
Tokyo Sonata est de ceux-là, mettant en abime un couple en déroute habitant dans une rue générique de Tokyo, une famille en voie de décomposition qui peine à refonder ces valeurs qu’elle croyait immuables.
Ozu célébrait les rituels patriarcaux, la figure tutélaire du père.
Avec Tokyo Sonata, Kiyoshi Kurosawa lui en sonne le glas avec distinction, humour et perspicacité.
Au-delà de cette relecture de la trame d’un Home Drama à la Ozu, s’échafaude une formidable réflexion sur l’évolution de la société japonaise, sur ses mutations, ainsi qu’un film aux indéniables qualités plastiques : beauté des panoramiques filés en travelling.
Ombres et lumières, poésie de la mise en scène et du jeu atypique des acteurs.
Parmi tant de scènes à citer : demeure celle où le plus jeune des fils pianote imperturbablement sur un clavier trouvé dans la rue qui jamais ne rendra de son, mais renforcera autant son plaisir que le sentiment de sa vocation.
Scène toute simple, pas édifiante pour un sou mais où sourd l’émotion.
Parallèlement, tout a valeur de parabole dans ce film, les postures, les déclarations de principe, la place du père et des fils et même la maison ; mais les apparences ont tôt fait d’être démontées.
Au fil du récit, les personnages : un père au chômage, son gamin qui tend à la maturité, son autre fils, jeune homme qui prend le parti-pris des États-Unis- ancien ennemi- doivent se perdre pour mieux se retrouver au sein de la communauté familiale ; la femme fait office de rempart contre la dislocation des valeurs ancestrales.
C’est d’ailleurs, sa présence : elle est là devant nous tapie dans l'ombre de sa cuisine, fantôme aux bras ballant tenus le long du corps.
Son apparition clôt le film . Présence renforcée par un travail subtil, aigu de la photographie qui la capte entre chien et loup devant une mer aux vaguelettes dont les mouvements semblent avoir été accélérés.
Un grand, rare et beau film qui surprend et étonne.
jeudi 12 mars 2009
mercredi 11 mars 2009
La Fille du RER (2008), d'André Téchiné, durée 105 mn, sortie le 18 mars 2009.
Résumé :
Jeanne vit dans un pavillon de banlieue avec sa mère Louise. Les deux femmes s'entendent bien. Louise gagne sa vie en gardant des enfants. Jeanne, sans trop de conviction, cherche un emploi.
Un jour, en lisant une annonce sur le net, Louise croit que le destin frappe à sa porte. Elle nourrit l'espoir de faire engager sa fille chez Samuel Bleistein, un avocat de renom qu'elle a connu dans sa jeunesse.
L'univers de Jeanne et celui de Bleistein sont à des années lumières de distance... Pourtant, ils vont se rencontrer à cause d'un mensonge inouï que Jeanne va échafauder.
Le film est l'histoire de ce mensonge qui va devenir le fait divers le plus médiatisé et le plus politisé de ces dernières années.
Nombre de projets passés de Téchiné, ont tenté de cerner, puis d’interroger le rapport de l’intime au collectif alternant récits à la tonalité romanesque, avec des histoires fondées sur une biographie inspirante et inspirée.
Bien que s’inscrivant dans cette recherche, "LA Fille du RER" répond à de nouvelles contraintes d’écriture et de projet.
Son titre d’abord, nous rappelle immédiatement la fameuse histoire dite de la fausse agression du RER dont on a peu à près aujourd’hui oublié le contexte et les dates (événement qui fut l’objet d’un emballement médiatique, étatique disproportionné).
Force est de considérer qu’aujourd’hui nous n’avons retenu de cette histoire fantasque et grotesque -que l’on dit vraie, que l’aspect anecdotique pour ne pas dire trivial d’une « fausse » agression, contredite, réfutée plus tard par un mensonge ; anecdote ou fait-divers monté en épingle et s’achevant en eau de boudin, comme énormément de faits colportés par les médias- traités de manière instantané sans le recul nécessaire à la vérification des preuves et contre-preuves.
Inspiré par une pièce de Jean Marie Besset (RER), le nouveau film d’André Téchiné coécrit avec Odile Barski s’appuie donc sur cette histoire très polémique.
L’intérêt principal du film réside à la fois dans le traitement de cette information déjà quasiment oubliée, presque effacée, mais aussi dans le recyclage « actif » et créatif d’un fait divers qui fournit une matière première propre à générer de la fiction, propre à fonder une esthétique ainsi qu’un film pas seulement intelligent mais sensible,comme envahie de sensorialité.
On retrouve d’ailleurs dans certaines scènes, souvent les aspects solaires des « Roseaux sauvages ».
Je crois que l’important dans "la Fille du RER" n'est pas dans la technicité de son récit, ni dans le fait que ce film interroge notre rapport au mensonge, à l’oubli, à l’amnésie à l’histoire, mais dans la part accordée à l'émotion, à l'ineffable et au sensible
C'était le souhait principal du cinéaste.
Aussi a t'il fait se rencontrer pour notre plaisir une jolie fille rousse, un beau loulou : une histoire d'amour s'est tissée entre les deux....
Pour moi, la leçon de ce film pourrait aussi tenir en trois points : volonté affirmée pour un cinéaste de se confronter au monde dans lequel il évolue, et ce dans toutes ses contradictions.
Volonté de se confronter à un réel aujourd'hui surmédiatisé, irréalisé,tout en s’en distançant par les moyens du cinéma (qui fait aussi écran, qui produit de la distance) ; immobilité dans le mouvement, primauté accordé au visage d’Emilie Dequenne, et aux visages qui portent déjà leurs propres images échappées d'autres films : Deneuve,Blanc, Duvauchelle, Demy.
Dans ce film, le désir malgré les rencontres physiques s’échafaude souvent hors du réel, sur Internet, via les sites de messagerie, s’affranchit de la distance formée par deux écrans interposés, ménageant finalement plus de frustration que de satisfaction.
Brave new world.
Troublante est cette scène de séduction entre nos deux tourtereaux distants mais face à face,suants, à moitié nus devant leurs ordinateurs , enveloppés d’une chaleur moite, et qui jouent, rejouent la carte du tendre, immergés dans ce réel néantisé par la présence de ces écrans, écrans qui portent leurs mots d’amour comme seul témoignage d’une réalité tangible et immédiate.
"Je t’aime, tu m’aimes, quand c'est qu'on se voit ?" rédigés en lettres noires sur fond blanc.
Une très belle idée que de nous remontrer, de mettre en exergue, d'éclairer ce que nous ne voyons même plus tant ces rituels font désormais partie de nos conventions. On a fini par les oublier.
Un amour froid, clinique, vécu à distance, amour frémissant dans le crépitement des claviers.
Les spectateurs reconnaitront aussi leur réel transformé par la télévision, joli prisme déformant qui leur fait souvent confondre réel et représentation ; télévision qui trône là sur son socle dans l’espace domestique d’un pavillon de banlieue mochard mais tapissé de fleurs ; télévision qui montre, présente ces reportages partiaux, aux voix monocordes qui vous expédient un sujet avec le ton de la certitude étriqués en une minute trente
Immobilité dans le mouvement : spectaculaire entrée en matière digne d’ un film futuriste , long travelling avant, décrivant les longues droites, les courbes circulaires formée par les tunnels sombres, par les néons allumés, les quais monumentaux éclairés par des néons , qui jalonnent ces rails du RER ; envoutantes parce qu'insaisissables dans leurs motivations ou leurs buts, demeurent aussi ces promenades , ces errances sans fin, de ces jeunes gens en roller qui semblent tourner pour rien, pure dépense, et qui avalent les rubans de goudron, tout en semblant souscrire à l’écran à une forme d’immobilité telles les figures d’un tableau saisies sur un fond, figées dans leur mouvement par la caméra. Paradoxe.
Primauté accordé au visage de Jeanne Fabre, cette rousse flamboyante aux cheveux teints à la bouche gourmande et boudeuse jouée par Emilie Dequenne, dont la présence physique, le dessin et la stylisation de la coiffure appellent à nous tout le catalogue des héroïnes qui ont déjà prêté leur corps aux images crées par Téchiné (Barocco, Les sœurs Brontë), et peut-etre aussi quelque souvenirs de tableaux quelconques...
En revanche, l'histoire secondaire qui s'emboite si parfaitement dans le premier récit, (malgré la beauté de sa fable) nous laisse un peu sur notre fin (elle appelle à nous tous les clichés d’une Bar Mitsva et d’un contexte juif, planté dans toute sa splendeur ; attachement d’un père à son fils, du père au grand-père...) clichés parfois contournés par un point de vue de cinéaste roué qui sait saisir mieux que personne, les temps morts, les entre-deux...
Cette histoire secondaire bien qu’habilement troussée fait un peu office de pièce rapportée même si elle sous-tend paradoxalement l’ensemble du film, organise les interrelations, contribue à donner du rythme, à aérer la lourdeur de la relation du couple en train de naitre entre un voyou possessif et une jeune fille perdue…
Cependant, on a du mal à adhérer à l’artificialité trop prononcée, presque artificielle, toc de ce second récit vaguement moral, qui irrigue l’histoire d’amour et de mensonge d’une jolie jeune femme un peu folle.
Néanmoins, on demeure fasciné par cette capacité de Téchiné à convoquer le merveilleux, l’onirisme contre le naturalisme.
Jolie scène de la barque noyée sous des trombes d’eaux et de Jeanne marchant sous la pluie.
De la fille du RER, on retiendra l’idée d’une belle histoire d’amour naissante,l'idée d'un film aux couleurs exacerbées comme le désir d'une jeune névrosée qui elle aussi irréalise son monde.
l’idée d’un magnifique portrait filmé d’une jeune femme montée sur roulettes qui erre dans un paysage urbain ceinturé de ponts sombres, de goudron et de béton.
No man’s land uniformément gris, envahi du bruit continu des trains et du Rer qui donne son nom au film.
Film envahi par le continuum de la musique Pop,Rock qu’elle écoute sur son MP3.
Jeanne erre dans sa vie, jusqu’à finir par s’inventer des histoires telle Alice figée devant son miroir...
JLC
Jeanne vit dans un pavillon de banlieue avec sa mère Louise. Les deux femmes s'entendent bien. Louise gagne sa vie en gardant des enfants. Jeanne, sans trop de conviction, cherche un emploi.
Un jour, en lisant une annonce sur le net, Louise croit que le destin frappe à sa porte. Elle nourrit l'espoir de faire engager sa fille chez Samuel Bleistein, un avocat de renom qu'elle a connu dans sa jeunesse.
L'univers de Jeanne et celui de Bleistein sont à des années lumières de distance... Pourtant, ils vont se rencontrer à cause d'un mensonge inouï que Jeanne va échafauder.
Le film est l'histoire de ce mensonge qui va devenir le fait divers le plus médiatisé et le plus politisé de ces dernières années.
Nombre de projets passés de Téchiné, ont tenté de cerner, puis d’interroger le rapport de l’intime au collectif alternant récits à la tonalité romanesque, avec des histoires fondées sur une biographie inspirante et inspirée.
Bien que s’inscrivant dans cette recherche, "LA Fille du RER" répond à de nouvelles contraintes d’écriture et de projet.
Son titre d’abord, nous rappelle immédiatement la fameuse histoire dite de la fausse agression du RER dont on a peu à près aujourd’hui oublié le contexte et les dates (événement qui fut l’objet d’un emballement médiatique, étatique disproportionné).
Force est de considérer qu’aujourd’hui nous n’avons retenu de cette histoire fantasque et grotesque -que l’on dit vraie, que l’aspect anecdotique pour ne pas dire trivial d’une « fausse » agression, contredite, réfutée plus tard par un mensonge ; anecdote ou fait-divers monté en épingle et s’achevant en eau de boudin, comme énormément de faits colportés par les médias- traités de manière instantané sans le recul nécessaire à la vérification des preuves et contre-preuves.
Inspiré par une pièce de Jean Marie Besset (RER), le nouveau film d’André Téchiné coécrit avec Odile Barski s’appuie donc sur cette histoire très polémique.
L’intérêt principal du film réside à la fois dans le traitement de cette information déjà quasiment oubliée, presque effacée, mais aussi dans le recyclage « actif » et créatif d’un fait divers qui fournit une matière première propre à générer de la fiction, propre à fonder une esthétique ainsi qu’un film pas seulement intelligent mais sensible,comme envahie de sensorialité.
On retrouve d’ailleurs dans certaines scènes, souvent les aspects solaires des « Roseaux sauvages ».
Je crois que l’important dans "la Fille du RER" n'est pas dans la technicité de son récit, ni dans le fait que ce film interroge notre rapport au mensonge, à l’oubli, à l’amnésie à l’histoire, mais dans la part accordée à l'émotion, à l'ineffable et au sensible
C'était le souhait principal du cinéaste.
Aussi a t'il fait se rencontrer pour notre plaisir une jolie fille rousse, un beau loulou : une histoire d'amour s'est tissée entre les deux....
Pour moi, la leçon de ce film pourrait aussi tenir en trois points : volonté affirmée pour un cinéaste de se confronter au monde dans lequel il évolue, et ce dans toutes ses contradictions.
Volonté de se confronter à un réel aujourd'hui surmédiatisé, irréalisé,tout en s’en distançant par les moyens du cinéma (qui fait aussi écran, qui produit de la distance) ; immobilité dans le mouvement, primauté accordé au visage d’Emilie Dequenne, et aux visages qui portent déjà leurs propres images échappées d'autres films : Deneuve,Blanc, Duvauchelle, Demy.
Dans ce film, le désir malgré les rencontres physiques s’échafaude souvent hors du réel, sur Internet, via les sites de messagerie, s’affranchit de la distance formée par deux écrans interposés, ménageant finalement plus de frustration que de satisfaction.
Brave new world.
Troublante est cette scène de séduction entre nos deux tourtereaux distants mais face à face,suants, à moitié nus devant leurs ordinateurs , enveloppés d’une chaleur moite, et qui jouent, rejouent la carte du tendre, immergés dans ce réel néantisé par la présence de ces écrans, écrans qui portent leurs mots d’amour comme seul témoignage d’une réalité tangible et immédiate.
"Je t’aime, tu m’aimes, quand c'est qu'on se voit ?" rédigés en lettres noires sur fond blanc.
Une très belle idée que de nous remontrer, de mettre en exergue, d'éclairer ce que nous ne voyons même plus tant ces rituels font désormais partie de nos conventions. On a fini par les oublier.
Un amour froid, clinique, vécu à distance, amour frémissant dans le crépitement des claviers.
Les spectateurs reconnaitront aussi leur réel transformé par la télévision, joli prisme déformant qui leur fait souvent confondre réel et représentation ; télévision qui trône là sur son socle dans l’espace domestique d’un pavillon de banlieue mochard mais tapissé de fleurs ; télévision qui montre, présente ces reportages partiaux, aux voix monocordes qui vous expédient un sujet avec le ton de la certitude étriqués en une minute trente
Immobilité dans le mouvement : spectaculaire entrée en matière digne d’ un film futuriste , long travelling avant, décrivant les longues droites, les courbes circulaires formée par les tunnels sombres, par les néons allumés, les quais monumentaux éclairés par des néons , qui jalonnent ces rails du RER ; envoutantes parce qu'insaisissables dans leurs motivations ou leurs buts, demeurent aussi ces promenades , ces errances sans fin, de ces jeunes gens en roller qui semblent tourner pour rien, pure dépense, et qui avalent les rubans de goudron, tout en semblant souscrire à l’écran à une forme d’immobilité telles les figures d’un tableau saisies sur un fond, figées dans leur mouvement par la caméra. Paradoxe.
Primauté accordé au visage de Jeanne Fabre, cette rousse flamboyante aux cheveux teints à la bouche gourmande et boudeuse jouée par Emilie Dequenne, dont la présence physique, le dessin et la stylisation de la coiffure appellent à nous tout le catalogue des héroïnes qui ont déjà prêté leur corps aux images crées par Téchiné (Barocco, Les sœurs Brontë), et peut-etre aussi quelque souvenirs de tableaux quelconques...
En revanche, l'histoire secondaire qui s'emboite si parfaitement dans le premier récit, (malgré la beauté de sa fable) nous laisse un peu sur notre fin (elle appelle à nous tous les clichés d’une Bar Mitsva et d’un contexte juif, planté dans toute sa splendeur ; attachement d’un père à son fils, du père au grand-père...) clichés parfois contournés par un point de vue de cinéaste roué qui sait saisir mieux que personne, les temps morts, les entre-deux...
Cette histoire secondaire bien qu’habilement troussée fait un peu office de pièce rapportée même si elle sous-tend paradoxalement l’ensemble du film, organise les interrelations, contribue à donner du rythme, à aérer la lourdeur de la relation du couple en train de naitre entre un voyou possessif et une jeune fille perdue…
Cependant, on a du mal à adhérer à l’artificialité trop prononcée, presque artificielle, toc de ce second récit vaguement moral, qui irrigue l’histoire d’amour et de mensonge d’une jolie jeune femme un peu folle.
Néanmoins, on demeure fasciné par cette capacité de Téchiné à convoquer le merveilleux, l’onirisme contre le naturalisme.
Jolie scène de la barque noyée sous des trombes d’eaux et de Jeanne marchant sous la pluie.
De la fille du RER, on retiendra l’idée d’une belle histoire d’amour naissante,l'idée d'un film aux couleurs exacerbées comme le désir d'une jeune névrosée qui elle aussi irréalise son monde.
l’idée d’un magnifique portrait filmé d’une jeune femme montée sur roulettes qui erre dans un paysage urbain ceinturé de ponts sombres, de goudron et de béton.
No man’s land uniformément gris, envahi du bruit continu des trains et du Rer qui donne son nom au film.
Film envahi par le continuum de la musique Pop,Rock qu’elle écoute sur son MP3.
Jeanne erre dans sa vie, jusqu’à finir par s’inventer des histoires telle Alice figée devant son miroir...
JLC
samedi 21 février 2009
mercredi 14 janvier 2009
dimanche 7 décembre 2008
dimanche 23 novembre 2008
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samedi 1 novembre 2008
lundi 27 octobre 2008
mardi 21 octobre 2008
LE PETIT MONSIEUR AVEC LA COUPE AU BOL- EXTRAIT DE COURTS RECITS
La vie des êtres, leur existence peuvent s’avérer parfois aux yeux de leurs prochains, mystérieuse sinon inquiétante, formée d’apparitions, de réapparitions et de brusques disparitions, aussi invisibles et impalpables que la soie d’une araignée.
L’exemple de ce petit monsieur qui paraissait presque sans âge et qui croisait souvent ma route en est un bon exemple .
S'il m'avait fallu vous le décrire, je vous l'aurais décrit ainsi : c'était un homme de taille moyenne avec de très grands yeux souvent écarquillés qui saillaient sous des arcades sourcilières sans cils, sa tête était oblongue telle celle d'un poisson un peu jaune, posée sur son buste large et épais au ventre proéminent et tombant hors de son pantalon de velours jaune ou vert.
Notre homme portait des petits gilets colorés, bariolés des vêtements tout aussi excentriques, une espèce de perruque jaune couleur paille.
Je me souviens de sa voix qui disait très lentement avec un accent américain accompagnant sa phrase de gestes filés et suspendus tels ceux d’un automate : « Ho, vous savez Madame, je ne sais pas pourquoi mais ils finissent tous par partir, ici les locataires, personne ne reste ».
Je revois avec exactitude, son corps étrange, mou un peu coincé, se déplaçant avec gêne et difficultés dans l’encadrement de la porte de son appartement.
Je n’avais pas compris encore que c’était peut-être de lui qu’il parlait, quand il parlait de « départ ».
Je l’ai croisé deux ou trois fois et j’ignorais toujours son nom et l’ignore toujours d’ailleurs.
Je l’ai toujours appelé « le petit monsieur avec la coupe au bol » et on se disait bonjour bonsoir.
Il marchait traînant par une laisse trop longue un chien minuscule genre pinscher que son ami, (parce qu’il avait un ami) avait dû faire peindre en rose, ou bien un autre chien plus massif, je le vois encore marcher le long d’une route droite, tourner à un angle et puis disparaître derrière une de ces cabines de téléphone qui commençaient à être démantelées.
Un jour, une semaine, passa, des mois, puis je ne le revis plus, mais plus du tout.
Sans jamais le connaître, je m’étais dit qu’il était parti en voyage, car ça lui arrivait souvent de disparaître soudainement, et qu’il devait être magicien ou exercer une profession liée au music-hall ou au spectacle.
Sa silhouette, son excentricité, sa gestuelle, tout vraiment tout attestait de cette vocation.
Or, apparemment, il n’en était rien, mais je ne fais que supposer.
L’accent américain à lui seul et cette gestuelle auraient pu corroborer mes présomptions, mais je ne suis pas détective, juste un réalisateur qui cherche de nouveaux sujets et des acteurs ou interprètes potentiels, je m’en tiens à leurs voix, et à leurs apparences, à leurs mouvements à leur gestuelle, à leurs postures et du reste, je ne se me mêle pas de la vie des êtres, je m’efforce juste d’un peu de les comprendre quand cela m’est possible de les comprendre, d’observer leur quotidien, de les écouter parce que c’est mon métier, de regarder leur vie passer comme passe la mienne avec douceur et aménité dans une sorte de brouillard qui s’apparente à un rêve.
Parfois dans ma vie, les souvenirs prennent le pas sur ce qui a été en réalité.
C’est le cas peut-être ici.
En imagination, je revois donc ce petit monsieur à la tête oblongue de poisson, avec cette coupe au bol, marcher à l’infini, comme suspendu au dessus de l'eau, marcher encore sur une route très droite, puis tourner à un angle et disparaître définitivement.
"Plop !" comme une bulle de savon.
Il aura fallu que je sois avec des amis pour que parlant de cet homme qu’eux aussi avaient un jour croisé dans leur quotidien, pour apprendre qu’il était définitivement mort.
Soudainement, j’ai été pris d’une vive émotion, en pensant que jamais plus je ne le reverrai cet homme mystérieux qui promenait son chien en journée; homme qui parlait à ses voisins avec cet accent que je pourrais qualifier de new-yorkais, espèce de magicien, aux longs gestes filés d’automate que je prenais pour un prestidigitateur.
L’exemple de ce petit monsieur qui paraissait presque sans âge et qui croisait souvent ma route en est un bon exemple .
S'il m'avait fallu vous le décrire, je vous l'aurais décrit ainsi : c'était un homme de taille moyenne avec de très grands yeux souvent écarquillés qui saillaient sous des arcades sourcilières sans cils, sa tête était oblongue telle celle d'un poisson un peu jaune, posée sur son buste large et épais au ventre proéminent et tombant hors de son pantalon de velours jaune ou vert.
Notre homme portait des petits gilets colorés, bariolés des vêtements tout aussi excentriques, une espèce de perruque jaune couleur paille.
Je me souviens de sa voix qui disait très lentement avec un accent américain accompagnant sa phrase de gestes filés et suspendus tels ceux d’un automate : « Ho, vous savez Madame, je ne sais pas pourquoi mais ils finissent tous par partir, ici les locataires, personne ne reste ».
Je revois avec exactitude, son corps étrange, mou un peu coincé, se déplaçant avec gêne et difficultés dans l’encadrement de la porte de son appartement.
Je n’avais pas compris encore que c’était peut-être de lui qu’il parlait, quand il parlait de « départ ».
Je l’ai croisé deux ou trois fois et j’ignorais toujours son nom et l’ignore toujours d’ailleurs.
Je l’ai toujours appelé « le petit monsieur avec la coupe au bol » et on se disait bonjour bonsoir.
Il marchait traînant par une laisse trop longue un chien minuscule genre pinscher que son ami, (parce qu’il avait un ami) avait dû faire peindre en rose, ou bien un autre chien plus massif, je le vois encore marcher le long d’une route droite, tourner à un angle et puis disparaître derrière une de ces cabines de téléphone qui commençaient à être démantelées.
Un jour, une semaine, passa, des mois, puis je ne le revis plus, mais plus du tout.
Sans jamais le connaître, je m’étais dit qu’il était parti en voyage, car ça lui arrivait souvent de disparaître soudainement, et qu’il devait être magicien ou exercer une profession liée au music-hall ou au spectacle.
Sa silhouette, son excentricité, sa gestuelle, tout vraiment tout attestait de cette vocation.
Or, apparemment, il n’en était rien, mais je ne fais que supposer.
L’accent américain à lui seul et cette gestuelle auraient pu corroborer mes présomptions, mais je ne suis pas détective, juste un réalisateur qui cherche de nouveaux sujets et des acteurs ou interprètes potentiels, je m’en tiens à leurs voix, et à leurs apparences, à leurs mouvements à leur gestuelle, à leurs postures et du reste, je ne se me mêle pas de la vie des êtres, je m’efforce juste d’un peu de les comprendre quand cela m’est possible de les comprendre, d’observer leur quotidien, de les écouter parce que c’est mon métier, de regarder leur vie passer comme passe la mienne avec douceur et aménité dans une sorte de brouillard qui s’apparente à un rêve.
Parfois dans ma vie, les souvenirs prennent le pas sur ce qui a été en réalité.
C’est le cas peut-être ici.
En imagination, je revois donc ce petit monsieur à la tête oblongue de poisson, avec cette coupe au bol, marcher à l’infini, comme suspendu au dessus de l'eau, marcher encore sur une route très droite, puis tourner à un angle et disparaître définitivement.
"Plop !" comme une bulle de savon.
Il aura fallu que je sois avec des amis pour que parlant de cet homme qu’eux aussi avaient un jour croisé dans leur quotidien, pour apprendre qu’il était définitivement mort.
Soudainement, j’ai été pris d’une vive émotion, en pensant que jamais plus je ne le reverrai cet homme mystérieux qui promenait son chien en journée; homme qui parlait à ses voisins avec cet accent que je pourrais qualifier de new-yorkais, espèce de magicien, aux longs gestes filés d’automate que je prenais pour un prestidigitateur.
dimanche 19 octobre 2008
samedi 27 septembre 2008
lundi 22 septembre 2008
dimanche 21 septembre 2008
dimanche 14 septembre 2008
vendredi 12 septembre 2008
jeudi 11 septembre 2008
mercredi 10 septembre 2008
Christophe Colomb, l'énigme de Manoel De Oliveira
Prochainement, je vais aller voir ce film : le dernier sorti de Manuel de Oliveira qui vient d'avoir cent ans.
mardi 12 août 2008
LOUIS JOUVET
Phrase dénichée dans un entretien entre KARL LAGERFELD-LUCHINI dans Telerama.
Ils boursouflent la phrase de leurs intentions personnelles et ils détruisent l'innocence de la réplique
Ils boursouflent la phrase de leurs intentions personnelles et ils détruisent l'innocence de la réplique
vendredi 30 mai 2008
LANCELOT DU LAC par ROBERT BRESSON, 67 mn, 1974
Regarder un film de Bresson, c’est observer chaque fois comme chez un peintre ou un musicien une invariance des thèmes, des thématiques, des personnages, et des rituels, de leurs rituels.
Importance primordiale des rituels chez Bresson.
Mais en même temps, dans ce film, on ne peut que s’émouvoir de sa capacité à convoquer, d’invoquer, scander, répercuter autant les lointains souvenirs d’une culture chrétienne immémoriale qui tombe rarement dans l’écueil de la bigoterie, tout en favorisant l’émergence de quelque émotion violente profonde, qui correspond aux ressenti intime et profond, pour ne pas dire convulsif d’un cinéaste qui sait peindre et montrer la passion.
L’histoire de lancelot du lac et la conquête du Graal.
Une histoire bien connue que tout un chacun porte en soi tout en l’ayant un peu oubliée.
Question de bataille et de conquêtes.
Conquérir son territoire.
Chaque bataille déchaîne sa violence.
D’emblée, ce sont des images qui frappent nos sens autant que les sons effleurent ou cinglent nos oreilles.
C’est une gerbe de sang qui coule bruyamment et à grands flots du tronçon sanguinolent d’un chevalier décapité, ou d’un torse encore engoncé dans sa dérisoire armure qui ne le protège finalement de rien.
Ce sont des promenades où l’on voit galoper dans une forêt des chevaux harnachés.
C’est la mise à sac d’un autel, de sa croix et de son ciboire organisée par une troupe d’officiers félons.
Rarement un film de Bresson n’a tiré sur la corde d’un spectaculaire aussi étrange que menaçant.
Plus tard, une musique martiale composée par Philippe Sarde organise, temporise et annonce le défilé des personnages, leur lutte pour le pouvoir et pour l’amour d’une certaine Guenièvre.
Plus tard, encore, un orage suivi d’une pluie torrentielle s’abat sur le campement des chevaliers, orage qui fait hennir de peur les chevaux qui pressentent son avancée.
Pour mieux appréhender ce film,Il faudrait peut-être porter d’abord l’accent sur les sons, la piste sonore, constituée de bruits d’improbables chevauchées, de ces hennissements nerveux, de bruits d’éperon sonnant contre le cuir des flancs des chevaux, de sonneries étranges scandant des entrées et des sorties de personnages qui ressemblent à s’y méprendre à nos buzzers, et aussi de paroles souvent lourdes de sous-entendu prononcées par des hommes qui bataillent dans leur lourde armure grinçante qui les entrave plus qu’autre chose.
Ensuite, il faudrait porter l’accent sur cette insistance de l’image et du cadre à montrer des corps souvent sans tête, corps enferrés dans leur action répétitive : monter à cheval, éperonner une cible, remonter à cheval, enfoncer l’épée dans son fourreau, s’habiller ou enfiler son armure.
Devant cette insistance, on pense à ce film de Len Lye qui montrait de manière répétitive le montage de carcasses automobiles.
Il faudrait aussi s’intéresser à ces duels à la lance entre deux fractions adverses dont on ne nous montre qu’une succession de lever de drapeau à droite puis à gauche, tantôt une rangée de spectateur, une simili barrière de bois tenue par une femme qui fait office de gardien de l’enceinte comme si un choix avait discriminé un ensemble et avait éludé l’inutile au profit du nécessaire et de son absolue invraisemblance.
Dans cette histoire d’amour courtois et de bataille, telle à son habitude, Bresson appréhende l’amour de manière aussi courtoise que frustrée.
Il est un contrechamp qui combine l’image d’un huis qui ne cesse de vibrer frénétiquement avec l’image de la promise dans son grand lit blanc.
Il est une chaste scène d’amour où un des chevaliers dont j’ai oublié le nom serre très fort la belle contre lui, l’étreint mais quand il veut la déshabiller, et la voir celle-ci inévitablement se rétracte.
Et oui, l’érotisme chez Bresson se niche peut-être ailleurs plutôt que dans cet inaccomplissement.
La forêt par exemple, avec la richesse de ses arbres et de leurs ramures offre un magnifique panorama que foulent au grand galop les chevaliers d’un autre temps.
Il semble que ce film possède la force et la résonance d’un grand tambour à la peau bien tendue qui fait sonner en nous l’émotion et ça suffit pour faire un film et nous tenir en haleine jusqu’au bout.
Importance primordiale des rituels chez Bresson.
Mais en même temps, dans ce film, on ne peut que s’émouvoir de sa capacité à convoquer, d’invoquer, scander, répercuter autant les lointains souvenirs d’une culture chrétienne immémoriale qui tombe rarement dans l’écueil de la bigoterie, tout en favorisant l’émergence de quelque émotion violente profonde, qui correspond aux ressenti intime et profond, pour ne pas dire convulsif d’un cinéaste qui sait peindre et montrer la passion.
L’histoire de lancelot du lac et la conquête du Graal.
Une histoire bien connue que tout un chacun porte en soi tout en l’ayant un peu oubliée.
Question de bataille et de conquêtes.
Conquérir son territoire.
Chaque bataille déchaîne sa violence.
D’emblée, ce sont des images qui frappent nos sens autant que les sons effleurent ou cinglent nos oreilles.
C’est une gerbe de sang qui coule bruyamment et à grands flots du tronçon sanguinolent d’un chevalier décapité, ou d’un torse encore engoncé dans sa dérisoire armure qui ne le protège finalement de rien.
Ce sont des promenades où l’on voit galoper dans une forêt des chevaux harnachés.
C’est la mise à sac d’un autel, de sa croix et de son ciboire organisée par une troupe d’officiers félons.
Rarement un film de Bresson n’a tiré sur la corde d’un spectaculaire aussi étrange que menaçant.
Plus tard, une musique martiale composée par Philippe Sarde organise, temporise et annonce le défilé des personnages, leur lutte pour le pouvoir et pour l’amour d’une certaine Guenièvre.
Plus tard, encore, un orage suivi d’une pluie torrentielle s’abat sur le campement des chevaliers, orage qui fait hennir de peur les chevaux qui pressentent son avancée.
Pour mieux appréhender ce film,Il faudrait peut-être porter d’abord l’accent sur les sons, la piste sonore, constituée de bruits d’improbables chevauchées, de ces hennissements nerveux, de bruits d’éperon sonnant contre le cuir des flancs des chevaux, de sonneries étranges scandant des entrées et des sorties de personnages qui ressemblent à s’y méprendre à nos buzzers, et aussi de paroles souvent lourdes de sous-entendu prononcées par des hommes qui bataillent dans leur lourde armure grinçante qui les entrave plus qu’autre chose.
Ensuite, il faudrait porter l’accent sur cette insistance de l’image et du cadre à montrer des corps souvent sans tête, corps enferrés dans leur action répétitive : monter à cheval, éperonner une cible, remonter à cheval, enfoncer l’épée dans son fourreau, s’habiller ou enfiler son armure.
Devant cette insistance, on pense à ce film de Len Lye qui montrait de manière répétitive le montage de carcasses automobiles.
Il faudrait aussi s’intéresser à ces duels à la lance entre deux fractions adverses dont on ne nous montre qu’une succession de lever de drapeau à droite puis à gauche, tantôt une rangée de spectateur, une simili barrière de bois tenue par une femme qui fait office de gardien de l’enceinte comme si un choix avait discriminé un ensemble et avait éludé l’inutile au profit du nécessaire et de son absolue invraisemblance.
Dans cette histoire d’amour courtois et de bataille, telle à son habitude, Bresson appréhende l’amour de manière aussi courtoise que frustrée.
Il est un contrechamp qui combine l’image d’un huis qui ne cesse de vibrer frénétiquement avec l’image de la promise dans son grand lit blanc.
Il est une chaste scène d’amour où un des chevaliers dont j’ai oublié le nom serre très fort la belle contre lui, l’étreint mais quand il veut la déshabiller, et la voir celle-ci inévitablement se rétracte.
Et oui, l’érotisme chez Bresson se niche peut-être ailleurs plutôt que dans cet inaccomplissement.
La forêt par exemple, avec la richesse de ses arbres et de leurs ramures offre un magnifique panorama que foulent au grand galop les chevaliers d’un autre temps.
Il semble que ce film possède la force et la résonance d’un grand tambour à la peau bien tendue qui fait sonner en nous l’émotion et ça suffit pour faire un film et nous tenir en haleine jusqu’au bout.
BATALLA EN EL CIELO DE CARLOS REYGADAS, 70 mn , 35 MM COUL, 2005
Héritier de la tradition théâtrale, nombre de films consacrent la relation ancillaire et opposent maître et domestique.
Cette convention fait apparaître et émerger naturellement tous les antagonismes et les paroxysmes liés à une forme de conquête de pouvoir et participent d’une création d’une dramaturgie cohérente.
Il est curieux de constater le retournement opéré par Carlos Reygadas (dont c’est le deuxième film après Japon) qui focalise l’attention du spectateur sur le chauffeur d’une jeune femme pulpeuse, riche aussi belle que Venus et non sur celle-ci.
Nous pénétrons donc dans la vie de ce chauffeur
Au fond,dans cette histoire, son histoire, ce qui nous est proposé c’est d’avancer comme dans les coulisses dans une affaire strictement privée.
La séquence d’introduction commence donc par une « audacieuse » scène de fellation entre ce chauffeur au visage si singulier, chauffeur obèse et ventripotent et cette jeune femme qui lui procure ce plaisir.
Fondé aussi sur une trame policière qui vise à montrer un chauffeur finalement traqué pour avoir enlevé un bébé pour son étrange femme qui ne peut sans doute en mettre au monde, ce film sème ses confettis le long d’une étrange route qui ne mène nulle part si ce n’est à une forme de contemplation qui aboutira à un plan d’ensemble hors de la ville, lieu du malaise.
Contemplation sans cesse présente, quand des scènes de ville nous sont données à voir, avec cette voix off qui alimente l’action du film, scène de ville défilant devant un pare-brise, et aussi à la levée crépusculaire du drapeau mexicain, séquence qui n’est pas filmée d’une manière habituelle académique, multipliant les belles contre-plongées mais selon un angle singulier ; quand aussi ce chauffeur contemple longuement le corps de cette jeune femme après lui avoir fait l’amour.
Il est un autre aspect du film qu’il convient peut-être de souligner : il s’agit du dépouillement assumé, décidé de la mise en scène qui convoque et installe des plans fixes et frontaux souvent gommés de tout bruit naturel auquel on a rajouté des sons étranges, parfois presque indéfinissables.
Deux séquences celle du métro avec sa lumière blanchâtre et verte ainsi que celle la séquence de la résidence attestent de ce parti pris, cependant, dans la séquence du métro, des sons technos et des sonneries électroniques procurent à l’image des sens hétérogènes qui déréalisent quelque peu la supposée vérité documentaire du plan,de même que le silence présent sur les images de la résidence qui tient lieu de bordel de luxe efface toute forme de réalité au profit de l’émergence d’une abstraction.
Enfin, question de casting, dans ce film on pourrait parler de « visagéité » tant chaque visage des protagonistes a été sciemment choisi, convoquant peut-être cette dialectique classique de la belle et la bête mais peu importe, l’image semble être déformée ou imprimée par ces visages et leurs traits qui impriment au récit une singularité, un mystère qui rappellent à nous on ne sait quel souvenir d’une poterie aztèque.
La qualité de cette alliance entre les images et les sons, les parti-pris de mise en scène, les angles de vue primitifs et sans sophistication font de ce film, un film moderne,audacieux, même si le récit policier n’est guère haletant et ne nous passionne guère.
Libre au spectateur d’entrer ou pas dans ce conte étrange venu du Mexique.
Cette convention fait apparaître et émerger naturellement tous les antagonismes et les paroxysmes liés à une forme de conquête de pouvoir et participent d’une création d’une dramaturgie cohérente.
Il est curieux de constater le retournement opéré par Carlos Reygadas (dont c’est le deuxième film après Japon) qui focalise l’attention du spectateur sur le chauffeur d’une jeune femme pulpeuse, riche aussi belle que Venus et non sur celle-ci.
Nous pénétrons donc dans la vie de ce chauffeur
Au fond,dans cette histoire, son histoire, ce qui nous est proposé c’est d’avancer comme dans les coulisses dans une affaire strictement privée.
La séquence d’introduction commence donc par une « audacieuse » scène de fellation entre ce chauffeur au visage si singulier, chauffeur obèse et ventripotent et cette jeune femme qui lui procure ce plaisir.
Fondé aussi sur une trame policière qui vise à montrer un chauffeur finalement traqué pour avoir enlevé un bébé pour son étrange femme qui ne peut sans doute en mettre au monde, ce film sème ses confettis le long d’une étrange route qui ne mène nulle part si ce n’est à une forme de contemplation qui aboutira à un plan d’ensemble hors de la ville, lieu du malaise.
Contemplation sans cesse présente, quand des scènes de ville nous sont données à voir, avec cette voix off qui alimente l’action du film, scène de ville défilant devant un pare-brise, et aussi à la levée crépusculaire du drapeau mexicain, séquence qui n’est pas filmée d’une manière habituelle académique, multipliant les belles contre-plongées mais selon un angle singulier ; quand aussi ce chauffeur contemple longuement le corps de cette jeune femme après lui avoir fait l’amour.
Il est un autre aspect du film qu’il convient peut-être de souligner : il s’agit du dépouillement assumé, décidé de la mise en scène qui convoque et installe des plans fixes et frontaux souvent gommés de tout bruit naturel auquel on a rajouté des sons étranges, parfois presque indéfinissables.
Deux séquences celle du métro avec sa lumière blanchâtre et verte ainsi que celle la séquence de la résidence attestent de ce parti pris, cependant, dans la séquence du métro, des sons technos et des sonneries électroniques procurent à l’image des sens hétérogènes qui déréalisent quelque peu la supposée vérité documentaire du plan,de même que le silence présent sur les images de la résidence qui tient lieu de bordel de luxe efface toute forme de réalité au profit de l’émergence d’une abstraction.
Enfin, question de casting, dans ce film on pourrait parler de « visagéité » tant chaque visage des protagonistes a été sciemment choisi, convoquant peut-être cette dialectique classique de la belle et la bête mais peu importe, l’image semble être déformée ou imprimée par ces visages et leurs traits qui impriment au récit une singularité, un mystère qui rappellent à nous on ne sait quel souvenir d’une poterie aztèque.
La qualité de cette alliance entre les images et les sons, les parti-pris de mise en scène, les angles de vue primitifs et sans sophistication font de ce film, un film moderne,audacieux, même si le récit policier n’est guère haletant et ne nous passionne guère.
Libre au spectateur d’entrer ou pas dans ce conte étrange venu du Mexique.
lundi 26 mai 2008
LOULOU (1980), 35 MM COUL de Maurice Pialat. 150 mn.
Etrangement ce film ressemble à un de ses premiers courts-métrages daté de 1960, court-métrage titré : « L’amour existe ».
Un beau titre trompeur et fallacieux.
Tourné en pellicule noir et blanc, à Courbevoie, Suresnes, Pantin, Vincennes, Orly, L’amour existe filmait, montrait les banlieues de la région parisienne au début des années soixante, faisant remonter par nappes la nostalgie de l’enfance, les images du passé, mais aussi et surtout le vide de la vie quotidienne, le ronron.
Ce film s’achevant sur des grands ensembles en construction du côté d’Orly, laissait le spectateur figé, pétrifié, muet sur son fauteuil, presque sans espoir de sortie.
Vingt ans plus tard, c’est la même ligne directrice, le même sentiment d’inéluctable et de vacuité, la même volonté de filmer la ville et la banlieue, que Pialat met en lumière, met en scène, souligne avec une sorte de délectation étrange et morbide ; sentiment pondéré par un humour acide et aigre jeté sur une tragi-comédie tissée entre trois personnages.
Commençant par un extérieur nuit dans des tons bleutés montrant un personnage secondaire, une femme brune longiligne et mystérieuse aux cheveux longs, marchant dans la nuit sous les arcatures d’un pont (petite comptable qui, comme elle dit si bien « se fait chier dans la vie », comptable dont on apprendra tout par la suite du tempérament fougueux et électrique) puis s’en détournant par un subtil panoramique, qui montre Loulou joué par Gérard Depardieu marchant dans le noir dédale d’une cour intérieure d’un vieil immeuble vermoulu,
Inspiré par une histoire vraie qui donne corps et vérité à une facticité aux accents faussement naturalistes, ce film raconte la dérive amoureuse d’une jeune femme nommée Nelly jouée par Isabelle Huppert qui s’ennuie avec un mari un peu veule mais honnête et mature, joué par Guy Marchand qui, comme le dirait la maxime voudrait son bonheur et lui a livré une « cage dorée » dans laquelle elle s’ennuie.
Dans un bal populaire, elle rencontre un loulou de banlieue qui l’assaille sous les yeux même de ce mari qui se défend, proteste puis abandonne la partie après l’avoir giflée et sermonnée avec beaucoup de maladresse.
Dans la chaleur de cette nuit, sur l’air de Célimène, ses sentiments pour cet « affreux jojo » au grand cœur se révèlent aussitôt et l’entraînent à découcher.
Bien sûr son mari toujours aussi maladroit tente de la réconquérir, mais finit par l’humilier.
Plus que cette anecdote qui pourrait appartenir à la trame d’ un film de Duvivier célébrant les amours et les bagarres d’un jeune MATAMORE portant un blouson de cuir, célébrant les écartèlements suscités par un trio amoureux, peut-être faut-il y voir une peinture de corps et de figures disposées dans des espaces clos dans des chambres un peu vides, une peinture des émotions par nature éphémères et fugaces, volatiles comme de l’essence, mais une peinture formée de taches, de corps et de figures sans cesse en mouvement.
Un mouvement d’une pièce à une autre, d’un bar à un autre d’une rue à une autre, ou rarement voire jamais le ciel n’apparaît dans notre champ de vision.
Difficile d’identifier et de situer les lieux de tournages et d’action, tant celle-ci semble se limiter à des lieux ou à des rues souvent dans le flou.
Un film circulaire, fureteur en plan rapproché.
A cet égard, ces incessants panoramiques qui balayent l’espace cherchant la possible apparition d’un corps ou d’un visage dans le champ de la caméra atteste de cette volonté de capter dans les moindres recoins, jusque dans leur regard, leur silence évocateur, la vie en cours des personnages, leurs incertitudes, leurs grandeurs, leurs petites misères.
Pourtant cette autopsie d’un échec est jalonnée de pépites : l’humour tinté de misogynie mais raillant tout autant la masculinité grossière, inachevée, pour ne pas dire puérile de ce Loulou qui ignore ce qu’il veut faire de sa vie, qui se contente simplement de vivre en aspirant de grandes goulées d’air.
Pialat dans cette peinture acide des couples à la dérive n’épargne personne.
L’action de Loulou alternant les passages entre le bel appartement cossu mais désormais vide du mari trompé et l’hôtel puis le meublé, progresse plus par le jeu des sentiments et par les changements d’attitude de Nelly qui se lisent sans cesse sur son visage, dans son regard en constante évolution tel un paysage marin, que par l’action proprement dite qui est souvent stagnante, redondante.
Seule la séquence très émouvante de la petite fête chez mémère dans sa blouse bleue (qui paraît être sa mère adoptive) dans une sorte de guinguette exile le film dans un ailleurs, où il semble plus facile de couronner par deux lampées de martini le lien familial, l’amitié entre copains -eux aussi à la dérive, qu’un un amour fusionnel voué désormais à l’échec.
On dépanne les copains mais on assiste sidéré et insouciant à la faillite de ses amours, tel est Loulou.
Cependant là où l’amour existe, court-métrage aigre, nous faisait plonger dans une déprime sans fond, Loulou, magnifique film habité par la présence de deux très grands acteurs aux corps ronds, replets, charnus, nus, habité par leur chaleur fusionnelle nous laisse un sentiment d’espoir fondé sur le constat que ces deux-là malgré tout se sont aimés malgré tous leurs antagonismes, malgré leurs différence sociales.
Besoin d’aimer à tour prix et de transcender la vie.
Que faut-il choisir en fin de compte ?
La conformité d’une vie réglée comme un papier millimétré que l’on est libre de trouver ennuyeuse ou pas, ou une vie fondée sur de la rapine et une économie de la débrouille et l’assistance mutuelle de copains sortis de tôle.
A cette question, Pialat choisi de nous laisser dans l’incertitude, posant sa caméra entre ces deux points de vue, filmant frontalement Nelly racontant à Loulou au téléphone son avortement et annonçant par là la fin de son amour avec Loulou, montrant un frère bourgeoisement, théâtralement vêtu d’un petite gilet comme un banquier, qui apparaît dans leur meublé, et qui tente de faire revenir sa sœur vers le droit mais illusoire chemin des apparences ,des convenances, des conventions tout en renvoyant Loulou par ses questions incessantes à ses atermoiements, à ses absences de choix ; en un mot à toutes ses contradictions, insolubles contradictions.
Ainsi, le film fini comme il avait commencé dans une forme d’incertitude.
Un beau titre trompeur et fallacieux.
Tourné en pellicule noir et blanc, à Courbevoie, Suresnes, Pantin, Vincennes, Orly, L’amour existe filmait, montrait les banlieues de la région parisienne au début des années soixante, faisant remonter par nappes la nostalgie de l’enfance, les images du passé, mais aussi et surtout le vide de la vie quotidienne, le ronron.
Ce film s’achevant sur des grands ensembles en construction du côté d’Orly, laissait le spectateur figé, pétrifié, muet sur son fauteuil, presque sans espoir de sortie.
Vingt ans plus tard, c’est la même ligne directrice, le même sentiment d’inéluctable et de vacuité, la même volonté de filmer la ville et la banlieue, que Pialat met en lumière, met en scène, souligne avec une sorte de délectation étrange et morbide ; sentiment pondéré par un humour acide et aigre jeté sur une tragi-comédie tissée entre trois personnages.
Commençant par un extérieur nuit dans des tons bleutés montrant un personnage secondaire, une femme brune longiligne et mystérieuse aux cheveux longs, marchant dans la nuit sous les arcatures d’un pont (petite comptable qui, comme elle dit si bien « se fait chier dans la vie », comptable dont on apprendra tout par la suite du tempérament fougueux et électrique) puis s’en détournant par un subtil panoramique, qui montre Loulou joué par Gérard Depardieu marchant dans le noir dédale d’une cour intérieure d’un vieil immeuble vermoulu,
Inspiré par une histoire vraie qui donne corps et vérité à une facticité aux accents faussement naturalistes, ce film raconte la dérive amoureuse d’une jeune femme nommée Nelly jouée par Isabelle Huppert qui s’ennuie avec un mari un peu veule mais honnête et mature, joué par Guy Marchand qui, comme le dirait la maxime voudrait son bonheur et lui a livré une « cage dorée » dans laquelle elle s’ennuie.
Dans un bal populaire, elle rencontre un loulou de banlieue qui l’assaille sous les yeux même de ce mari qui se défend, proteste puis abandonne la partie après l’avoir giflée et sermonnée avec beaucoup de maladresse.
Dans la chaleur de cette nuit, sur l’air de Célimène, ses sentiments pour cet « affreux jojo » au grand cœur se révèlent aussitôt et l’entraînent à découcher.
Bien sûr son mari toujours aussi maladroit tente de la réconquérir, mais finit par l’humilier.
Plus que cette anecdote qui pourrait appartenir à la trame d’ un film de Duvivier célébrant les amours et les bagarres d’un jeune MATAMORE portant un blouson de cuir, célébrant les écartèlements suscités par un trio amoureux, peut-être faut-il y voir une peinture de corps et de figures disposées dans des espaces clos dans des chambres un peu vides, une peinture des émotions par nature éphémères et fugaces, volatiles comme de l’essence, mais une peinture formée de taches, de corps et de figures sans cesse en mouvement.
Un mouvement d’une pièce à une autre, d’un bar à un autre d’une rue à une autre, ou rarement voire jamais le ciel n’apparaît dans notre champ de vision.
Difficile d’identifier et de situer les lieux de tournages et d’action, tant celle-ci semble se limiter à des lieux ou à des rues souvent dans le flou.
Un film circulaire, fureteur en plan rapproché.
A cet égard, ces incessants panoramiques qui balayent l’espace cherchant la possible apparition d’un corps ou d’un visage dans le champ de la caméra atteste de cette volonté de capter dans les moindres recoins, jusque dans leur regard, leur silence évocateur, la vie en cours des personnages, leurs incertitudes, leurs grandeurs, leurs petites misères.
Pourtant cette autopsie d’un échec est jalonnée de pépites : l’humour tinté de misogynie mais raillant tout autant la masculinité grossière, inachevée, pour ne pas dire puérile de ce Loulou qui ignore ce qu’il veut faire de sa vie, qui se contente simplement de vivre en aspirant de grandes goulées d’air.
Pialat dans cette peinture acide des couples à la dérive n’épargne personne.
L’action de Loulou alternant les passages entre le bel appartement cossu mais désormais vide du mari trompé et l’hôtel puis le meublé, progresse plus par le jeu des sentiments et par les changements d’attitude de Nelly qui se lisent sans cesse sur son visage, dans son regard en constante évolution tel un paysage marin, que par l’action proprement dite qui est souvent stagnante, redondante.
Seule la séquence très émouvante de la petite fête chez mémère dans sa blouse bleue (qui paraît être sa mère adoptive) dans une sorte de guinguette exile le film dans un ailleurs, où il semble plus facile de couronner par deux lampées de martini le lien familial, l’amitié entre copains -eux aussi à la dérive, qu’un un amour fusionnel voué désormais à l’échec.
On dépanne les copains mais on assiste sidéré et insouciant à la faillite de ses amours, tel est Loulou.
Cependant là où l’amour existe, court-métrage aigre, nous faisait plonger dans une déprime sans fond, Loulou, magnifique film habité par la présence de deux très grands acteurs aux corps ronds, replets, charnus, nus, habité par leur chaleur fusionnelle nous laisse un sentiment d’espoir fondé sur le constat que ces deux-là malgré tout se sont aimés malgré tous leurs antagonismes, malgré leurs différence sociales.
Besoin d’aimer à tour prix et de transcender la vie.
Que faut-il choisir en fin de compte ?
La conformité d’une vie réglée comme un papier millimétré que l’on est libre de trouver ennuyeuse ou pas, ou une vie fondée sur de la rapine et une économie de la débrouille et l’assistance mutuelle de copains sortis de tôle.
A cette question, Pialat choisi de nous laisser dans l’incertitude, posant sa caméra entre ces deux points de vue, filmant frontalement Nelly racontant à Loulou au téléphone son avortement et annonçant par là la fin de son amour avec Loulou, montrant un frère bourgeoisement, théâtralement vêtu d’un petite gilet comme un banquier, qui apparaît dans leur meublé, et qui tente de faire revenir sa sœur vers le droit mais illusoire chemin des apparences ,des convenances, des conventions tout en renvoyant Loulou par ses questions incessantes à ses atermoiements, à ses absences de choix ; en un mot à toutes ses contradictions, insolubles contradictions.
Ainsi, le film fini comme il avait commencé dans une forme d’incertitude.
samedi 10 mai 2008
ROSSELINI- ACTE DES APOTRES/BRAVE NEW WORLD
Lors de la sortie de Dogville, les journalistes se sont émus à l’idée qu’un nouveau pas avait été franchi par le cinéma, dans le cadre de la direction d’acteurs, ceux-ci se déplaçant dans un décor tracé à la craie sur du carton.
Mais comme souvent, cette idée avait été précédée par une autre, d’abord, un certain nombre de pièces de Brecht avaient déjà posé fermement ce postulat d’un décor presque immatériel.
Et plus tard, mais dans un même esprit de distanciation, Rosselini qui fut le grand prophète de la télévision avait imaginé quelque chose de semblable
Le film intitulé : « L’acte des apôtres » d’une durée de cinq heures traitait des activités quotidiennes d’individus à la mort du christ et filmant des actions simples de gens simples.
Un tournage très abstrait, sans décors, où les acteurs étaient dirigés par radio ignoraient exactement où ils étaient parce que le décor était entièrement en trucage.
Ils étaient à quelque trois kilomètres de Rosselini.
Rosselini leur parlait à travers cet émetteur radio, décrivant avec précision la porte virtuelle qu’ils devaient passer.
On peut affirmer sans mentir que Rosselini a imaginé une télévision qui n’existera jamais, ou plus une télévision utopique où celle-ci aurait eu pour vertu première d’éclairer les spectateurs sur eux-mêmes, sur leur conscience politique, sociale, économique.
La prise de pouvoir par Louis XIV demeure un exemple phare de ce projet artistique
Surgissant de nulle part, un petit italien aux dents facettées de porcelaine, ancien vendeur de carte postale, roublard fat, hâbleur ayant fait fortune dans l’immobilier, a balayé tout ça et imposé pas à pas un modèle de télévision amnésique ; panorama faussement candide peuplé de présentateurs qui ressemblent à des baudruches ou à quelque homme de paille que le spectateur peut choisir d’effacer ou de dissoudre à coup de SMS surtaxés.
Brave new world.
Mais comme souvent, cette idée avait été précédée par une autre, d’abord, un certain nombre de pièces de Brecht avaient déjà posé fermement ce postulat d’un décor presque immatériel.
Et plus tard, mais dans un même esprit de distanciation, Rosselini qui fut le grand prophète de la télévision avait imaginé quelque chose de semblable
Le film intitulé : « L’acte des apôtres » d’une durée de cinq heures traitait des activités quotidiennes d’individus à la mort du christ et filmant des actions simples de gens simples.
Un tournage très abstrait, sans décors, où les acteurs étaient dirigés par radio ignoraient exactement où ils étaient parce que le décor était entièrement en trucage.
Ils étaient à quelque trois kilomètres de Rosselini.
Rosselini leur parlait à travers cet émetteur radio, décrivant avec précision la porte virtuelle qu’ils devaient passer.
On peut affirmer sans mentir que Rosselini a imaginé une télévision qui n’existera jamais, ou plus une télévision utopique où celle-ci aurait eu pour vertu première d’éclairer les spectateurs sur eux-mêmes, sur leur conscience politique, sociale, économique.
La prise de pouvoir par Louis XIV demeure un exemple phare de ce projet artistique
Surgissant de nulle part, un petit italien aux dents facettées de porcelaine, ancien vendeur de carte postale, roublard fat, hâbleur ayant fait fortune dans l’immobilier, a balayé tout ça et imposé pas à pas un modèle de télévision amnésique ; panorama faussement candide peuplé de présentateurs qui ressemblent à des baudruches ou à quelque homme de paille que le spectateur peut choisir d’effacer ou de dissoudre à coup de SMS surtaxés.
Brave new world.
samedi 29 mars 2008
WEEK END de Jean Luc Godard . Un film Allégorie
Week-end est un film passionnant, grâce et malgré son morceau de bravoure : cet immense travelling long de trois cent mètres que décrivent à l’envi tous les théoriciens du cinéma et qui nous laisse un peu sur notre fin mais qui raconte si bien les aspirations folles d’une époque.
Week-end n’en est pas pour autant une œuvre achevée, quelque chose manque pour parachever l’ouvrage surtout vers la fin du récit où le spectateur semble dérouté à l’image de ce couple constitué, formé de l’éternel gueulard JEAN YANNE, bien à sa place dans ce récit et de la molle MIREILLE DARC qui erre sans but sur cette grande route aussi sinueuse qu’un récit de Lewis Caroll.
Pourtant, l’entrée en matière comme toujours, commence tambour battant et s’élance dégageant un flux d’émotions.
Week-end, comédie dramatique s’empare du mythe du couple petit bourgeois satisfait et repu, mais finalement frustré par trop de satisfactions et qui finit par compenser en prenant sa bagnole pour aller faire un tour à la campagne, histoire de meubler le temps et l’ennui.
Ils habitent dans une belle résidence neuve et pimpante, mais n’ont pas l’air très heureux.
Peut-être même qu’ils se trompent mutuellement.
Peut-être même sûrement, c’est ce dont témoigne le langage de charretier de Jean Yanne qui malmène au téléphone une de ses amantes qu’il traite de « chienne ».
Depuis la hauteur de son balcon, JEAN YANNE voit une scène d’algarade se dérouler devant lui ; des hommes sortis de leur bagnole en viennent aux mains pour des motifs qui lui échappe, et leur combat finement réglé, telle une belle chorégraphie de boxeurs, finit par l’énerver considérablement.
Voici l’incident déclencheur et cette rixe finit par exacerber chez lui toutes ses tendances agressives, lui le gueulard.
Il veut donc partir mais énervé par un gosse irascible déguisé en petit indien qui le harcèle. Il finit par emboutir l’autre bagnole du voisin, une minable dauphine possédée par une petite bourgeoise, comme lui.
JEAN YANNE finit par se dépêtrer avec les poings et sa faconde de cette histoire échappant au fusil du mari lui aussi irascible qui semble tirer au gros sel sur lui et sa femme précieuse un peu fade qui tient beaucoup à son sac à main, à ses toilettes de chez St laurent.
Portrait irréaliste, satirique d’une époque.
A la faveur d’une banale invitation chez une belle-mère, Ils se retrouvent précipités avec leur coupé Ford dans le chaos d’un week-end comme les autres, sur la route duquel des gens comme eux vont s’empêtrer dans un embouteillage ou pour certains plus malchanceux mourir contre un arbre, un de ces arbres qui jonchent ces routes étroites des années soixante dix.
Ils trouveront aussi des révolutionnaires avec leurs tracteurs.
Des scènes édifiantes et de l’émotion.
Comme aucun autre, Godard sait filmer une femme qui parle de sexe avec froideur, tristesse et détachement et jouer de la distance entre sa voix neutre, monocorde, mais non dépourvue d’émotions et les mots crus qu’elle va prononcer.
Le sexe chez Godard raconté, possède souvent un fond de mélancolie protestante et moraliste.
Procédé théâtral certes, mais tous les procédés sont bons pour mener à la conduite d’une récit, à sa dramatisation ; procédé d’une rare efficacité, et MIREILLE DARC, dans la pénombre d’une pièce, mise à nue de manière documentaire et vériste, jouant son propre rôle vaguement dénudée soutien-gorge apparent, cuisses nues se confiant à son improbable mari ( une sorte de confident que nous ne reverrons plus) malgré la dureté de son monologue emprunté à Georges Bataille obtient là un de ses meilleurs rôles.
Se confiant à ce qui paraît être son mari, elle semble à la fois tendue et fragile, vulnérable racontant une espèce d’improbable partouze dont les ramifications semblent aussi infinies que le nombre des protagonistes, les noms changent, les positions, et même les prénoms.
Mais que faisait-elle dans cette composition des corps.
Parfois_ et là Godard sait faire vibrer le corde sensible du spectateur,il couvre la parole de cette femme triste et ses souvenirs qui remontent en nappe par de la musique un peu lyrique, celle crée par Georges Duhamel ; l’ensemble fonctionne bien comme la plupart des bande-sons chez Godard et contribue aussi à une dramatisation du récit.
Il est intéressant d’établir ce parallèle.
Souvenons-nous douze ans plus tard, en 1979 dans le violent « Sauve qui peut la vie », qui sonnait comme une renaissance et qui fut un succès public.
Godard y racontait la vie d’une prostituée venue de sa campagne, interprétée par Isabelle Huppert lui fera dire des mots tout aussi crus et filmera sans ambages dans une chambre d’hôtel de Lausanne la chaîne du désir, montrant non sans un certain humour, l’absurdité d’un tel esprit de géométrie dirigée par un dirigeant de football vulgaire, égrillard.
Sans adhérer nécessairement à cette manière de montrer l’amour, mais sans juger non plus cette indépendance d’esprit,cette autonomie qui est la marque d’un artiste il est néanmoins des constances qui ne peuvent s’ignorer et qui contrecarrent frontalement, volontairement la grivoiserie, la complaisance de certains autres qu’ une certaine MIREILLE DARC avait justement habité et nourri de son enveloppe, de sa voix fade, mièvre et niaise.
Week-end avance sur l’écran comme une réflexion qui s’établirait de concert avec le spectateur : voici l’histoire, voici les protagonistes, voici le contexte, et puis voilà comment ça déraille, et comment une utopie foutraque et dangereuse comme toutes les utopies peut naître du chaos ou de l’humus ; une utopie qui tiendrait autant du croisement d’une relecture des textes révolutionnaires de Robespierre et des autres et de Père Ubu par sa grossièreté, sa crudité, sa violence sous-jacente.
Un autre motif énigmatique émaille et jalonne ce film, et finit même par nous étonner : que de voitures entassées, renversées comprimées les unes contre les autres.: ce film ressemble bientôt à une promenade le long d’une casse automobile, ou à une sorte d’exacerbation d’un fait sociologique :le terrible et banal accident de voiture. Mais peut-être nous faut-il aller plus loin dans notre analyse pour saisir un peu du mystère.
Si l’on comprend rapidement le motif des automobiles cabossées et plus tard brûlées qui jonchent cette route, il nous est plus difficile de saisir avec acuité et précision ce que leur répétition obsédante, leur accumulation, le long de cette route finit par imprimer au récit. Comme un effacement de leur présence à cause justement de leur omniprésence Bientôt ces signes postés presque à chaque coin des routes, les bornant finissent par oblitérer cette réalité ou sa représentation au point de nous troubler,de nous désarçonner.
Un récit ramené au point-mort.
Une faillite organisée de la représentation, et s’organisant sciemment contre elle et voilà un film qui semble partir en roue libre semant ses protagonistes et le spectateur dans une forêt digne d’un cauchemar.
Des archétypes malmenés, malaxés.
D’ailleurs la rencontre, les rencontres avec un certain Joseph Basalmo qui tend des pièges et sa compagne sous une pluie battante à l’orée de cette forêt puis avec une improbable Alice de Pacotille qui tente de renforcer la rationalité scientifique du récit rejoint cette perspective déroutante et absurde.
On dirait une sorte de guerre incompréhensible, sans avions ni blindés avec d’invisibles protagonistes qui se joue là sous nos yeux, tout le monde semble vouloir s’étriper mais leurs intentions, leurs motivations semblent indiscernables, ingouvernables.
Tout ce qui possédait une forme de cohérence la perd finalement au profit d’une sorte de phénomène de sidération pour des atrocités et des événements spectaculaires qui nous sont représentés ou qui se présentent devant nous avec la forme d’une épiphanie dont le sens ne nous est pas ou plus révélé par l’énonciation d’un récit.
Perte du sens ?
Evidemment pour parachever cette peinture digne d’un Jérome Bosch, quoi de mieux qu’un batteur perdu dans une nuée de fougères, une assemblée d’hystériques révolutionnaires chevelus, vêtus à la diable de roses, et un horrible, grotesque cuisinier cannibale teint de rouge avec son grotesque couteau qui cuit des côtelettes.
Mais toute utopie fut –elle dangereuse révèle aussi sa part d’idéalisme et de beauté, celle qui permet au réalisateur d’offrir à des paysans aux allures dignes et raides tout droit sortis d’un tableau de Le Nain, d’assister à un concert de Mozart didactique dans une cour de ferme cossue de l’ancienne seine et Oise.
Qu’est devenu au fil de ce récit, le couple petit bourgeois du début ? et bien comme dans un récit primitif qui peuple l’inconscient de chacun depuis la nuit des temps le mari a été mangé par sa femme consommée, absorbée par le groupe, laquelle a coiffé ses cheveux au carré d’un de ces bandeaux roses communs à tous ces révolutionnaires qui ont pour la plupart mal fini et qui pourtant lui demeure très seyant.
Triomphe des apparences sur l’utopie et interrogation sur un star system en déroute.
Sans être un film totalement achevé ni dominé(-mais au fond est-ce là le but ou l’objectif d’une œuvre d’art ? tout cela est discutable ), on dirait un film aventureux, pour ne pas dire erratique : certaines réflexions ou thématiques politiques semblent un peu poussives ou datées et ne possèdent pas la grâce poétique envolée de La Chinoise, certaines séquences un peu longuettes : scène des monologues entre arabes et noirs avec les sandwiches devant une benne à ordures où les mouches volètent…
Pourtant, Week-end vaut le détour et synthétise les aspirations de l’époque de Godard à vouloir changer la donne, à inventer, expérimenter sans cesse fut-ce au prix d’une incompréhension d’un public devenu aujourd’hui si paresseux et si veule au point de faire triompher des nullités sans nom.
D’ailleurs, au contraire de Week-end, leurs titres paraissent interchangeables.
Week-end n’en est pas pour autant une œuvre achevée, quelque chose manque pour parachever l’ouvrage surtout vers la fin du récit où le spectateur semble dérouté à l’image de ce couple constitué, formé de l’éternel gueulard JEAN YANNE, bien à sa place dans ce récit et de la molle MIREILLE DARC qui erre sans but sur cette grande route aussi sinueuse qu’un récit de Lewis Caroll.
Pourtant, l’entrée en matière comme toujours, commence tambour battant et s’élance dégageant un flux d’émotions.
Week-end, comédie dramatique s’empare du mythe du couple petit bourgeois satisfait et repu, mais finalement frustré par trop de satisfactions et qui finit par compenser en prenant sa bagnole pour aller faire un tour à la campagne, histoire de meubler le temps et l’ennui.
Ils habitent dans une belle résidence neuve et pimpante, mais n’ont pas l’air très heureux.
Peut-être même qu’ils se trompent mutuellement.
Peut-être même sûrement, c’est ce dont témoigne le langage de charretier de Jean Yanne qui malmène au téléphone une de ses amantes qu’il traite de « chienne ».
Depuis la hauteur de son balcon, JEAN YANNE voit une scène d’algarade se dérouler devant lui ; des hommes sortis de leur bagnole en viennent aux mains pour des motifs qui lui échappe, et leur combat finement réglé, telle une belle chorégraphie de boxeurs, finit par l’énerver considérablement.
Voici l’incident déclencheur et cette rixe finit par exacerber chez lui toutes ses tendances agressives, lui le gueulard.
Il veut donc partir mais énervé par un gosse irascible déguisé en petit indien qui le harcèle. Il finit par emboutir l’autre bagnole du voisin, une minable dauphine possédée par une petite bourgeoise, comme lui.
JEAN YANNE finit par se dépêtrer avec les poings et sa faconde de cette histoire échappant au fusil du mari lui aussi irascible qui semble tirer au gros sel sur lui et sa femme précieuse un peu fade qui tient beaucoup à son sac à main, à ses toilettes de chez St laurent.
Portrait irréaliste, satirique d’une époque.
A la faveur d’une banale invitation chez une belle-mère, Ils se retrouvent précipités avec leur coupé Ford dans le chaos d’un week-end comme les autres, sur la route duquel des gens comme eux vont s’empêtrer dans un embouteillage ou pour certains plus malchanceux mourir contre un arbre, un de ces arbres qui jonchent ces routes étroites des années soixante dix.
Ils trouveront aussi des révolutionnaires avec leurs tracteurs.
Des scènes édifiantes et de l’émotion.
Comme aucun autre, Godard sait filmer une femme qui parle de sexe avec froideur, tristesse et détachement et jouer de la distance entre sa voix neutre, monocorde, mais non dépourvue d’émotions et les mots crus qu’elle va prononcer.
Le sexe chez Godard raconté, possède souvent un fond de mélancolie protestante et moraliste.
Procédé théâtral certes, mais tous les procédés sont bons pour mener à la conduite d’une récit, à sa dramatisation ; procédé d’une rare efficacité, et MIREILLE DARC, dans la pénombre d’une pièce, mise à nue de manière documentaire et vériste, jouant son propre rôle vaguement dénudée soutien-gorge apparent, cuisses nues se confiant à son improbable mari ( une sorte de confident que nous ne reverrons plus) malgré la dureté de son monologue emprunté à Georges Bataille obtient là un de ses meilleurs rôles.
Se confiant à ce qui paraît être son mari, elle semble à la fois tendue et fragile, vulnérable racontant une espèce d’improbable partouze dont les ramifications semblent aussi infinies que le nombre des protagonistes, les noms changent, les positions, et même les prénoms.
Mais que faisait-elle dans cette composition des corps.
Parfois_ et là Godard sait faire vibrer le corde sensible du spectateur,il couvre la parole de cette femme triste et ses souvenirs qui remontent en nappe par de la musique un peu lyrique, celle crée par Georges Duhamel ; l’ensemble fonctionne bien comme la plupart des bande-sons chez Godard et contribue aussi à une dramatisation du récit.
Il est intéressant d’établir ce parallèle.
Souvenons-nous douze ans plus tard, en 1979 dans le violent « Sauve qui peut la vie », qui sonnait comme une renaissance et qui fut un succès public.
Godard y racontait la vie d’une prostituée venue de sa campagne, interprétée par Isabelle Huppert lui fera dire des mots tout aussi crus et filmera sans ambages dans une chambre d’hôtel de Lausanne la chaîne du désir, montrant non sans un certain humour, l’absurdité d’un tel esprit de géométrie dirigée par un dirigeant de football vulgaire, égrillard.
Sans adhérer nécessairement à cette manière de montrer l’amour, mais sans juger non plus cette indépendance d’esprit,cette autonomie qui est la marque d’un artiste il est néanmoins des constances qui ne peuvent s’ignorer et qui contrecarrent frontalement, volontairement la grivoiserie, la complaisance de certains autres qu’ une certaine MIREILLE DARC avait justement habité et nourri de son enveloppe, de sa voix fade, mièvre et niaise.
Week-end avance sur l’écran comme une réflexion qui s’établirait de concert avec le spectateur : voici l’histoire, voici les protagonistes, voici le contexte, et puis voilà comment ça déraille, et comment une utopie foutraque et dangereuse comme toutes les utopies peut naître du chaos ou de l’humus ; une utopie qui tiendrait autant du croisement d’une relecture des textes révolutionnaires de Robespierre et des autres et de Père Ubu par sa grossièreté, sa crudité, sa violence sous-jacente.
Un autre motif énigmatique émaille et jalonne ce film, et finit même par nous étonner : que de voitures entassées, renversées comprimées les unes contre les autres.: ce film ressemble bientôt à une promenade le long d’une casse automobile, ou à une sorte d’exacerbation d’un fait sociologique :le terrible et banal accident de voiture. Mais peut-être nous faut-il aller plus loin dans notre analyse pour saisir un peu du mystère.
Si l’on comprend rapidement le motif des automobiles cabossées et plus tard brûlées qui jonchent cette route, il nous est plus difficile de saisir avec acuité et précision ce que leur répétition obsédante, leur accumulation, le long de cette route finit par imprimer au récit. Comme un effacement de leur présence à cause justement de leur omniprésence Bientôt ces signes postés presque à chaque coin des routes, les bornant finissent par oblitérer cette réalité ou sa représentation au point de nous troubler,de nous désarçonner.
Un récit ramené au point-mort.
Une faillite organisée de la représentation, et s’organisant sciemment contre elle et voilà un film qui semble partir en roue libre semant ses protagonistes et le spectateur dans une forêt digne d’un cauchemar.
Des archétypes malmenés, malaxés.
D’ailleurs la rencontre, les rencontres avec un certain Joseph Basalmo qui tend des pièges et sa compagne sous une pluie battante à l’orée de cette forêt puis avec une improbable Alice de Pacotille qui tente de renforcer la rationalité scientifique du récit rejoint cette perspective déroutante et absurde.
On dirait une sorte de guerre incompréhensible, sans avions ni blindés avec d’invisibles protagonistes qui se joue là sous nos yeux, tout le monde semble vouloir s’étriper mais leurs intentions, leurs motivations semblent indiscernables, ingouvernables.
Tout ce qui possédait une forme de cohérence la perd finalement au profit d’une sorte de phénomène de sidération pour des atrocités et des événements spectaculaires qui nous sont représentés ou qui se présentent devant nous avec la forme d’une épiphanie dont le sens ne nous est pas ou plus révélé par l’énonciation d’un récit.
Perte du sens ?
Evidemment pour parachever cette peinture digne d’un Jérome Bosch, quoi de mieux qu’un batteur perdu dans une nuée de fougères, une assemblée d’hystériques révolutionnaires chevelus, vêtus à la diable de roses, et un horrible, grotesque cuisinier cannibale teint de rouge avec son grotesque couteau qui cuit des côtelettes.
Mais toute utopie fut –elle dangereuse révèle aussi sa part d’idéalisme et de beauté, celle qui permet au réalisateur d’offrir à des paysans aux allures dignes et raides tout droit sortis d’un tableau de Le Nain, d’assister à un concert de Mozart didactique dans une cour de ferme cossue de l’ancienne seine et Oise.
Qu’est devenu au fil de ce récit, le couple petit bourgeois du début ? et bien comme dans un récit primitif qui peuple l’inconscient de chacun depuis la nuit des temps le mari a été mangé par sa femme consommée, absorbée par le groupe, laquelle a coiffé ses cheveux au carré d’un de ces bandeaux roses communs à tous ces révolutionnaires qui ont pour la plupart mal fini et qui pourtant lui demeure très seyant.
Triomphe des apparences sur l’utopie et interrogation sur un star system en déroute.
Sans être un film totalement achevé ni dominé(-mais au fond est-ce là le but ou l’objectif d’une œuvre d’art ? tout cela est discutable ), on dirait un film aventureux, pour ne pas dire erratique : certaines réflexions ou thématiques politiques semblent un peu poussives ou datées et ne possèdent pas la grâce poétique envolée de La Chinoise, certaines séquences un peu longuettes : scène des monologues entre arabes et noirs avec les sandwiches devant une benne à ordures où les mouches volètent…
Pourtant, Week-end vaut le détour et synthétise les aspirations de l’époque de Godard à vouloir changer la donne, à inventer, expérimenter sans cesse fut-ce au prix d’une incompréhension d’un public devenu aujourd’hui si paresseux et si veule au point de faire triompher des nullités sans nom.
D’ailleurs, au contraire de Week-end, leurs titres paraissent interchangeables.
vendredi 7 mars 2008
FILMCRITICA par un ennemi de Fellini
Je ne résiste pas à la tentation de vous citer l' extrait d’une critique consacrée à Satyricon réalisé en 1972, signée Sergio Arecco, ennemi notoire de Fellini qui vaut le détour et qui est citée dans le livre de l’un de ses anciens scénaristes, un certain Bernardino Zapponi.
« la lire, c’était entrer sur une planète inconnue : « le dernier travail de Fellini nous manifeste une différentiation sémantique, qui ne fait rien d’autre que renvoyer aux données conjecturées des deux expériences psychédéliques précédentes, Juliette des Esprits et Toby Dammit.
Une accumulation de niveaux et corrélats optiques qui déterminent arythmie, incongruence… « Et puis : « La réflexion iconique n’arrive pas à dimensionner l’exubérance du donné,et sélectionne seulement des secteurs passagers de la texture revendiquée, dénonçant un profit perdu macroscopique… » Et on parlait de « distraction mise hors de la distorsion des pleins et des vides pour conclure avec « …une siccité de moteurs idéologiques, de motivations grammaticales, de réalités romanesques. »
L’entropie de Federico Fellini. Le Kistch.
Federico était sous le charme. Presque admiratif.
« Comment peut-on écrire comme ça ? Murmurait-il.
Page 50 de « Mio fellini » par Zapponi, éditions de Fallois.
« la lire, c’était entrer sur une planète inconnue : « le dernier travail de Fellini nous manifeste une différentiation sémantique, qui ne fait rien d’autre que renvoyer aux données conjecturées des deux expériences psychédéliques précédentes, Juliette des Esprits et Toby Dammit.
Une accumulation de niveaux et corrélats optiques qui déterminent arythmie, incongruence… « Et puis : « La réflexion iconique n’arrive pas à dimensionner l’exubérance du donné,et sélectionne seulement des secteurs passagers de la texture revendiquée, dénonçant un profit perdu macroscopique… » Et on parlait de « distraction mise hors de la distorsion des pleins et des vides pour conclure avec « …une siccité de moteurs idéologiques, de motivations grammaticales, de réalités romanesques. »
L’entropie de Federico Fellini. Le Kistch.
Federico était sous le charme. Presque admiratif.
« Comment peut-on écrire comme ça ? Murmurait-il.
Page 50 de « Mio fellini » par Zapponi, éditions de Fallois.
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